Cette nouvelle a été écrite en moins d'une heure et m' a été inspiré bien involonterrement par Cornélia...
Merci à elle, donc et amitié à tous.
ENTERREMENT
J’en ai marre des enterrements !
Ce mois-ci, c’est le quatrième de mes amis que je vois mettre en terre.
J’entends la voix du prêtre, censée être apaisante…. rassurante !
« Notre ami nous a été brutalement arraché, il repose maintenant, et bla bla bla et bla bla et bla. »
Je ne crois pas en Dieu ni au Paradis…. Ce qui est paradoxale car je gagne ma vie en écrivant des histoires sur l’au-delà et ses mystères.
Enfin… Je gagne ma vie… si l’on peut dire !
Mes derniers manuscrits ont tous étés jugés insuffisamment bons et il y a belle lurette que je n’ai pas été publié.
Je quitte le cimetière sous une pluie diluvienne. J’habite à deux pas de là et marcher un peu sous la pluie ma fera le plus grand bien.
Je marche, les yeux rivés au sol…tellement perdu dans mes pensées que je percute un autre passant qui vient face à moi.
-Excusez-moi, désolé ! dis-je machinalement sans même relever les yeux.
-Xavier ? me dit une voix qu’il me semble reconnaître.
Je lève la tête.
- Paul…Oh pardon mon vieux, j’avais l’esprit ailleurs, je ne t’ai pas vu …
- Y’a pas d’mal ! Ça fait longtemps que je ne t’ai pas vu Xav. Qu’est-ce que tu deviens ?
- Rien de folichon. Je reviens à l’instant de l’enterrement d’Olivier…. Tu sais, mon copain que je t’ai présenté la dernière fois que tu es venu à la maison.
- Oui, je m’en souviens très bien. Je suis désolé ! Qu’est-ce qui lui est arrivé, il était jeune ?
- Assassiné !
- Merde, c’est pas vrai…
Ce « c’est pas vrai », c’est le genre de phrase qui me fout les boules.
J’ai envie de lui répondre : « Bien sur que ce n’est pas vrai, j’adore déconner avec la mort de mes potes, connard ! »
A la place, je me contente de répondre, lugubre :
-Si. Assassiné chez lui, avant hier. Les flics cherchent un suspect.
- C’est incroyable, on vit dans un monde de barges…
Paul marque une pause, avant de reprendre
- Je rentrais chez moi. Je t’offre un café. Ne reste pas seul, viens discuter un moment à la maison.
Paul habite un petit appartement dans un immeuble qui se trouve à moins de 20 mètres de là.
J’accepte.
Nous arrivons chez lui, et je pose ma serviette avant de retirer mon pardessus.
- Qu’est-ce que tu as dans ta mallette ? me demande Paul.
- Un manuscrit. Je l’ai pris machinalement… je pensais travailler dessus cette après midi, après l’enterrement… Histoire de me changer les idées !
Paul pose deux tasses sur la table ainsi que le sucre.
- Je peux jeter un coup d’œil ? me demande-t-il.
- Bien sur. Oh, ce n’est qu’un début, à peine le premier chapitre…Et vas-y, ne te gènes pas, dis-moi sincèrement ce que tu en penses.
Je lui tends une trentaine de pages qu’il me prend des mains.
Il s’installe confortablement dans son fauteuil et commence sa lecture.
- Tu t’occupes du café, Xav… Moi, je vais m’affairer sur ton chef d’œuvre ! me dit-il
Je vais à la cuisine et prends la cafetière. Un peu trop chaude, il me faut un torchon si je ne veux pas me brûler.
J’en trouve un sous l’évier.
Je reviens au salon et vois Paul, la mine ennuyée, qui me regarde bizarrement.
-Qu’est ce qu’il y a ? Tu as un problème ? lui demande-je le plus naturellement du monde.
Paul me fixe quelques secondes, visiblement occupé à chercher ses mots.
- C’est ton histoire… écoutes, ne le prends pas mal, mais… j’ai lu à peine trois pages et… bon, je ne sais pas comment te le dire mais… c’est nul, Xav ! Y’a rien là… ça n’a ni queue ni tête, on dirait que c’est écrit par un môme de 6eme…. non, c’est pas bon du tout. Je ne sais pas si l’as fait express mais…
Il s’interrompt. Puis un large sourire naît sur ses lèvres.
- C’est une blague… C’est une blague ce manuscrit et moi, je plonge !
Cette dernière phrase est à mes oreilles encore plus insupportable que les critiques qui l’on précédée.
Je sens que je deviens blême et que mes doigts se contractent sur la poignée de la cafetière. Mes phalanges doivent être blanches ! ! ! Ma vue se brouille…
Ce mois-ci, c’est le cinquième de mes amis que je vois mettre en terre.
J’en ai marre des enterrements !