Voici un texte que j'ai volontairement écrit dans un style très léger mais que j'aimerais améliorer. Votre avis est le bienvenu
Une chose horrible venait de se produire. Une véritable catastrophe. L’apocalypse selon tous les saints. La malédiction de la momie I et II réunis. Bref, c’était la merde quoi.
Alan avait appuyé une fois de trop sur la touche « snooze » de son réveil et s’était rendormi pendant une heure. Et maintenant, il était en retard.
Bon, surtout ne pas paniquer ! Ne pas s’énerver !
Facile à dire… Son patron, un exécrable crétin prétentieux et snobinard, un patron quoi, allait sans aucun doute sauter sur l’occasion pour lui rappeler qu’un employé de la fonction publique est censé arrivé à l’heure, et ce n’est pas la première fois que je vous en fait la remarque, Alan.
Il lui prendrait alors l’irrésistible envie de lui attacher ses ridicules bretelles à rayures à ses petites bourses d’aristocrate et ça allait lui miner sa journée, car bien entendu il ne le ferait pas.
En dix minutes, Alan eut le temps de : boire un café sans se brûler, se brosser les dents, faire une toilette de chat, s’habiller (il se félicita d’y avoir pensé) et de rassembler ses affaires de bureau qui gisaient dans l’appartement selon une formule de répartition encore inconnue à ce jour.
Heureusement, l’ascenseur semblait compatir au stress matinal d’Alan. Aussi quand ce dernier déboula en trombe dans le couloir, il n’eut plus qu’à entrer dans la cabine déjà présente, presser un bouton, et attendre que la machine le conduise aux sous-sols.
Il se précipita vers la voiture bleue métallisée qui trônait fièrement au milieu des Golf GTI des jeunes bourges de l’immeuble et s’arrêta net dans sa course. Il hésita entre rire et pleurer mais préféra finalement hurler un « merde » retentissant, de ceux qui viennent du cœur.
Il avait oublié ses clés au dessus. Il y a des jours comme ça où… Enfin, il y a des jours comme ça quoi.
L’ascenseur ne lui fit pas grâce deux fois de sa présence immédiate, aussi, il dut se résoudre à prendre les escaliers, non sans pousser au préalable une gamme relativement représentative du répertoire de ses jurons. Ben oui, six étages à pied, ça use, ça use…
L’ascension se fit dans la mauvaise humeur la plus noire. Il n’entendit même pas la voisine du troisième lui glisser un bonjour timide en le voyant passer. Et pour cause, il s’était mis à cet instant à hurler de rage, passant de « merde » à « fais chier » dans une rythmique très rock’n roll.
Il traversa le couloir en courant, appuya sur le bouton de l’ascenseur – étourdi mais prévoyant, Alan. – rentra chez lui, prit ses clés et repartit par l’ascenseur qui avait eu la bonté d’arriver pendant ce temps.
Si, la voiture démarra tout de même, consciente sûrement que son propriétaire était sur une pente raide. Et les pentes raides, elle, ça la connaissait. Alors elle ne fit pas de caprice et démarra aussitôt dans un doux ronronnement de moteur bien huilé.
Mais il ne fallait pas se le cacher. La journée commençait quand même très mal.
***
Après un dernier coup d’œil à son reflet dans le miroir, Sarah prend son sac à mains, ferme la porte à clé, et part rejoindre ze pôle de la beauté artificielle, véritable croisée des chemins de la cosmétique : Estée Lauder, parfums et produits de beauté.
Son boulot quoi.
Elle descend les escaliers pour rejoindre sa voiture, une Peugeot 106, forcément. Mais alors qu’elle croise un voisin entre deux marches, tout s’enchaîne très vite pour Sarah.
Elle lève la tête et esquisse un bonjour qui se noie aussitôt dans une marre insondable de mots de colère. L’inconnu la dépasse sans un regard et continue à grimper les marches quatre à quatre dans un concert grandissant d’auto flagellation verbale.
Bon…
Mais là où le bât blesse, c’est qu’elle se retourne sur son passage (plus par automatisme que par curiosité il faut dire) pour continuer d’observer l’étrange personnage.
Et ce fut là son erreur. C’était comme si son pied droit avait voulu se poser sur deux marches en même temps. Ajoutez à cela le fait qu’elle porte des talons et qu’elle ne regarde pas devant elle, vous aurez alors compris l’essentiel.
Ses jambes s’emmêlent et elle se vautre deux marches plus loin.
Résultat : un genou en sang (et donc fatalement, le collant filé), un poignet foulé et un talon cassé. Le désastre. Elle tempête, elle dit « aïe » et finit par se relever clopin-clopant.
Laissons lui le temps de reprendre ses esprits.
Quelques instants plus tard donc, elle appelle la parfumerie et dit à Colette de ne pas l’attendre ce matin. Celle-ci s’empresse de demander ce qui ne va pas et espère qu’il n’y a rien de grave au moins.
Mon œil. Sarah raccroche.
Elle appelle ensuite son médecin traitant et le supplie de la prendre en consultation ce matin parce qu’elle s’est fait très mal et que les urgences ça craint.
Il accepte. Un grand homme ce Docteur Sensoussi.
La voilà donc dans la salle d’attente avec les traditionnels canards en tous genre et les mamies hypocondriaques. Mais il y a ce jeune homme, pas trop vilain soit dit en passant, qui la regarde avec une insistance de plus en plus gênante. Il lui sourit maintenant. Tiens tiens.
Et ce qui devait arriver arriva, il s’approche d’une démarche cool, genre tout va bien, et se poste devant Sarah.
- Sarah ?
Il la connaît donc.
- Oui ? On se connaît ?
- Stéphane !
- …
- A la fac de droit !
Elle le remet, elle se rappelle maintenant de sa petite fossette sous le menton.
- Ouiiii !!! Comment vas-tu ?
- Ben écoute bien, si ce n’est…
D’un signe du menton (elle a toujours adoré cette fossette), il lui désigne son poignet. Il semblait avoir triplé de volume.
- Rien de grave, j’ai juste besoin d’anti-inflammatoires. Mais je suis pas encore prêt pour les JO… Je vois que tu as eu quelques soucis toi aussi…
- Oui, de mon côté j’ai expérimenté quelques pas de danse dans les escaliers.
- Et alors, y a du progrès ?
- Oui, je crois que je suis au point maintenant.
A ce moment là, la secrétaire passe la tête par la porte de la salle.
- Monsieur Chatel, c’est à vous.
Stéphane fait signe qu’il arrive et se tourne vers Sarah.
- Ecoute, si on s’échangeait nos coordonnées ? On pourrait se raconter ce qu’on est devenu devant un café…
- Au choix, je préfère une bière.
- Va pour une bière, lança Stéphane, le regard pétillant.
Sarah griffonne son numéro de portable au dos d’un ticket de parking. Stéphane, de son côté, lui tend une carte de visite blanc cassé aux lettres en surimpression, la classe.
La honte.
Et il part en lui adressant un sourire à fossette très réussi.
Ahh… Stéphane…
D’une manière étrange, Sarah ne sent plus la douleur.
***
- Je suis rentré.
Béatrice lève la tête de son magazine (Femme Actuelle) et pose sur son mari des yeux ronds, encore prise dans la torpeur de son article.
- Et alors, ce poignet ?
- C’est bien ce que je pensais, c’est rien du tout.
- Tant mieux.
- Je vais prendre une douche.
- Pense à allumer le chauffe-eau.
- Ok…
Béatrice fait mine un instant de se replonger dans sa lecture puis, quand elle entend l’eau s’écouler de la douche, se lève et traverse le salon à pas de loup.
Jusqu’au portemanteaux.
Jusqu’au blouson de Stéphane.
Jusqu’aux poches du blouson de Stéphane.
Qu’elle se met alors à fouiller avec à peine une pointe de culpabilité. La routine quoi.
Rien d’intéressant. Des clés, des mouchoirs, un ticket de parking, des chewing-gum et un reste de bounty.
Elle remet tout en place mais son regard est soudain attiré par le ticket de parking.
Elle croit rêver. Une greluche lui a refilé son numéro de téléphone. Sur un ticket de parking… A ce niveau là, ce n’est plus louche, c’est compromettant.
- STEPHANE !!!
Il n’entend rien évidemment alors elle se rue vers la salle de bain et se met à tambouriner après la porte.
- STEPHANE !!!
La douche s’arrête et quelques secondes après Stéphane apparaît, une serviette nouée autour de la taille et le regard ahuri.
- Qu’est-ce qui te prends de gueuler comme ça ? Qu’est-ce qu’il y a ?
Elle brandit le ticket et le secoue devant son nez.
- Voilà ce qu’il y a ! C’est qui cette poufiasse ?
La fossette rentre dans sa coquille.
- Une amie, rien de plus. Qu’est-ce que tu vas t’imaginer ma pauvre Béatrice ?
- Ce que je vais m’imaginer ??? Tu te fous de moi ? Je trouve par hasard le numéro d’une nana dans tes affaires et tu me demandes ce que je vais m’imaginer ???
- Je ne vois pas où est le problème… Je ne fais rien de mal, maintenant fous moi la paix !!!
Et il claque la porte au nez d’une Béatrice décomposée. Elle sent une boule s’installer dans son estomac. Pas de la haine, ni de l’amertume, mais de la tristesse. Une profonde tristesse.
Stéphane ne s’intéresse plus à elle. Il pratique des activités sans elle. Il ne lui parle plus de ses projets ni de ses journées de travail. Il ne la regarde plus, ne la touche plus.
Il ne l’aime plus…
Elle éclate en sanglots et part se réfugier dans la chambre. Elle empoigne le téléphone et appelle « SOS détresse à n’importe quelle heure du jour et de la nuit, je suis là pour toi » et compose donc le numéro de Valérie.
- Allo ?
- (pleurs)
- Béatrice ?
- (pleurs)
- Qu’est-ce qui ne va pas ma chérie ?
- C’est… c’est…
- Stéphane ?…
- Oui… articule-t-elle entre deux sanglots.
- Bon écoute, bouge pas je viens tout de suite !
- …
- Béatrice ?
- Oui, c’est d’accord… Stéphane devrait partir dans dix minutes, arrange toi pour arriver quand il ne sera plus là…
- Ok. Bon ben à tout de suite, et en attendant tu me sèches ces larmes, d’acc ?
- D’acc… dit-elle dans un soupir.
Elle raccroche, mais au lieu de sécher ses larmes, elle se met à pleurer de plus belle.
Valérie prend son duffle-coat, laisse la porte du salon ouverte à cause des chats et saute dans sa voiture pour rejoindre la jungle urbaine.
En vraie parisienne, Valérie roule vite et grille les feux rouges. Elle se permet même de refuser les priorités, dont une en particulier qui se situait à l’entrée d’un virage. Elle a cru voir une voiture piler sous l’effet de la surprise, mais elle n’en est pas sûre. En fait, elle s’en fout. Elle a d’autres chats à fouetter.
Elle arrive donc chez Béatrice en moins de vingt minutes, ce qui constitue un exploit non négligeable.
Elle frappe à la porte, Béatrice lui ouvre et là elle lui coule littéralement dessus, toutes vannes ouvertes. Elles s’installent alors au salon et sirotent un café tout en discutant.
- Ce mec n’est pas fait pour toi, Béa ! Combien de fois je te l’ai dit ? Il est trop… froid. Pas assez attentionné, trop imbu de lui-même… Tu vois ?
- Mais je l’aimeûûûû !!! dit-elle dans un pleur au lyrisme inquiétant.
- …
- …
- Je comprends.
- Alors qu’est-ce que je dois faire ?
- Avant tout, je veux que tu prennes du repos, et quand je dis repos je parle de vacances. Des vraies.
- …
- Mais je t’en supplie Béa, lève le pied ! Tu mènes une vie pas possible et la dépression te guette. Alors repose toi et soigne toi !
- …
- De toute façon, j’y veillerai. Je n’ai pas envie d’avoir une mort sur la conscience !
Béatrice serre alors la main de son amie et lui sourit.
Enfin.
***
Une matinée de merde. Mais ce n’est pas fini, l’après-midi promet d’être pire. Des temps durs s’annoncent pour Alan.
Bien sûr, il a eut droit au sermon de Monsieur « bretelles à la con » mais il a du subir également bon nombre de mesquineries de la part de ses supérieurs directs qui, selon toute vraisemblance, avaient reçu des consignes très strictes à ce sujet.
Alors quand il sort du bureau, aux alentours de 13 heures, Alan a les nerfs à vifs. De plus, il n’a pas trouvé de place le matin pour se garer et doit donc se coltiner presque un kilomètre pour rejoindre sa voiture. Ce qui fait qu’il ne sera pas rentré avant 14 heures, qu’il n’aura probablement pas le temps de prendre un repas chaud et donc qu’il aggravera encore le retard affolant qu’il a déjà pris. Alors ça va, hein !
Du coup, il n’a plus faim.
Il s’arrête net sur place et hésite. S’il reprenait le travail dés maintenant, il pourrait combler quelque peu ses heures de retard, et ainsi sortir plus tôt ce soir. Il lui serait toujours possible, au pire des cas, de s’acheter un sandwich afin de prendre des forces pour attaquer cet après-midi chargé.
Oui, voilà, il allait faire comme ça.
Mais Alan n’aura jamais l’occasion d’hésiter entre thon-mayonnaise et jambon-beurre. C’est effectivement le ventre vide qu’il se fit faucher par une Seat Ibiza grise qui avait donné un coup de volant un peu appuyé pour éviter le chauffard qui lui avait refusé la priorité.
De toute façon, la journée avait mal commencé. Il y a des jours comme ça où…
Il y a des jours comme ça où un petit rien suffit à vous gâcher la journée.
Sujet: Croisements 
Sinon pour le nom du magazine, je l'ai mis entre parenthèse parce que je voulais vraiment l'indiquer comme une note (cynique) au passage... Mais peut être que tu as raison et que ça alourdit la phrase!
Et merci pour le commentaire!!
, j'ai vu un mec à qui on vient d'apprendre que sa femme a eu un accident, s'inquiéter de l'état de sa voiture avant de s'enquérir de celui de sa tendre épouse...) Je suis sûr que c'est avec cette idée en tête que Vini a écrit ça, sinon 
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