Virée en bagnole

Toujours dans le trip histoire d'une page, un ptit texte sorti des tiroirs.

Colin, comme tous les jeunes gens de son âge, était invincible. Aussi se mit-il à accélérer encore lorsque l’aiguille du compteur passa les 200. Ted exultait et ouvrait de grands yeux ahuris. Un sourire idiot lui barrait le visage.
- Vas-y mec, fonce !
Colin eut un petit sourire en coin et jeta un regard entendu à Ted. Les bras tendus sur le volant, il enfonça la pédale d’accélérateur à fond. Sous leurs yeux, le paysage défilait à une vitesse étourdissante et les marquages au sol ne formaient désormais plus qu’une ligne continue. Le spectacle était grisant et le terrain de jeu sans limite. L’autoroute n’était guère fréquentée à une heure pareille de la nuit.
A l’arrière, les deux jeunes filles n’osaient pas prononcer le moindre mot, de peur qu’il ne fusse interprété comme un encouragement, ou qu’il ne réveille quelque réflexe puéril de provocation. Manifester sa peur était dans ce cas précis une erreur à ne pas commettre. Alors elles se taisaient, et priaient en silence pour que ce quart d’heure de folie ne se termine pas en un sombre défilé de gyrophares.
Colin jetait de temps à autres un coup d’œil dans le rétroviseur afin de se délecter des mines déconfites des filles. Son sourire satisfait s’agrandit encore quand il aperçut leur teint cireux et leurs yeux égarés. Ted, lui, congratulait son pote à coups de cris bestiaux et d’onomatopées en tous genres. En voilà une sacrée virée en bagnole, bordel.
Elles échangèrent un regard impuissant et se tinrent la main afin de se donner un peu de courage. Bientôt, tout ceci serait terminé. Bientôt, elles seraient rentrées chez elles et pourraient alors rire de leur couardise.
Bientôt, il atteindrait les 240. Du jamais fait encore. Le moteur, à fond de régime, hurlait son effort dans un vrombissement sourd, et l’aiguille du compteur, fébrile, grimpait péniblement les derniers crans avant l’exploit ultime. Le regard rivé sur le tableau de bord, Colin serra les dents et raffermit sa prise sur le volant. Bientôt… Plus que quelques secondes…
Bientôt… Plus que quelques kilomètres encore avant la bretelle de sortie. Les mains moites et la gorge sèche, elles attendaient avec anxiété le panneau blanc qui annoncerait la fin du calvaire. Elles se demandaient aussi ce qui avait bien pu leur passer par la tête quand elles étaient montées avec ces deux crétins. Mais il pleuvait, l’air était glacé et la nuit déjà bien avancée. Alors…
- Ca y est, bordel ! Ca y est! 240, mec!
Compteur. Pluie. Phares. Ligne blanche. Sortie. 240. Serre moi la main. Trop vite. Trop tard.
Ca y est, bordel.
Merde.

Très bon texte ! Dommage que la fin soit un peu ambiguë, on ne sait finalement pas pour sûr s'ils ont juste loupé la sortie (et les filles, dégoûtées, se disent qu'ils vont continuer ce cirque jusqu'à la prochaine sortie) ou si la voiture s'explose dans la rambarde.
Personnellement, j'ai déjà été à 240 sur l'autoroute (ce n'était pas moi qui conduisais, et l'autoroute n'avait pas de limitation de vitesse). Finalement, le problème avec l'autoroute, c'est qu'on ne remarque pas sa vitesse, car toutes les voitures vont vite, les paysages sont souvent constitués de longues étendues désertes, et comme les lignes blanches sont plus longues, on a l'impression de faire un 80 pépère alors qu'on est déjà à 140...
Toi, tes gars, ils ne slalommaient au moins pas entre les voitures ^^

Ouais remarque l'autoroute c'est pas ce qu'il y a de plus dangereux... Sinon j'ai mis 240 mais c'était comme ça, je suppose que c'est assez courant sur autoroute.
Sinon pour la fin imagine ce que tu veux, pour ma part j'avais bien envie de les voir se viander! (hé hé)
En tout cas merci de ton commentaire!

Ouais, moi aussi j'ai envie qu'ils se viandent *sadique*.
Je ne sais pas si 240 est très courant sur les autoroutes en France, mais en tout cas, en allemagne, ça l'est. Heureusement que tu n'as pas mis plus, car les trois-quarts des bagnoles ne vont que très difficilement plus vite...

Pas mal !...
Des fois, sur l'autoroute, je me dis "et si je donnais un coup de volant de côté, combien de tonneaux on ferait" ? ça fait peur la vitesse je trouve, surtout à moto... tu te dis que si tu te vautres, bonjour l'éparpillement des membres !

j'ai trouve ce texte plutot cool.....Même si assez cliché si je peux m'exprimer ainsi......
La fin en mot très court, est vraiment un bon concept, mais je trouve qu'il y en a trop , ce qui alourdit l'effet....

D'accord avec Peter : le concept de la fin est bien, mais avec moins de mots pourrait être plus choc.

Pour moi ils se viandent sans aucun doute, sinon ou serait l’intérêt. Là-dessus, le « trop vite, trop tard » est terrible et à conserver.

C’est très bien écrit. Juste un détail qui me gène (répétition) :

« Bientôt… Plus que quelques secondes…
Bientôt… Plus que quelques kilomètres »

Bravo.