Inner Mental Cage

Et voilà, depuis le temps, voici un petit essai. Ce n'est pas vraiment une nouvelle, plutôt une expérience. J'ai essayé de retranscrire des impressions dans ces quelques lignes, à vous de me dire si c'est réussi. Bonne lecture.



Un instant de répit. La noirceur vient de s’épaissir à nouveau, masquant à ma vue les formes qui rôdent autour de moi ; je ne peux pas me relâcher, pas trop longtemps, sans quoi je sais qu’elles me retrouveront. Elles me retrouvent toujours.

C’est un soulagement de voir se redessiner devant moi les contours familiers du monde matériel. Mon lit, quelques livres, et par la fenêtre la lumière voilée d’une matinée nuageuse. Ou peut-être est-ce l’après midi ?

Je profite de l’accalmie pour ouvrir le carnet posé sur le bureau et attraper un crayon. Comme souvent, juste après le retour, j’ai quelques difficultés à me concentrer. Je mâchonne le bout de mon crayon, mes mains courent nerveusement sur le bois du bureau comme de grandes araignées affolées.

Comment tout ça a commencé ? Se souvenir est difficile. C’est courir le risque de révéler ma présence et d’abréger ce moment de repos. Mais j’ai été comme vous. J’avais une vie comme la votre, je voyais le soleil se lever tous les matins en me rendant au travail, je rentrais le soir et ma femme m’accueillait avec un sourire. Je crois. Mais peut-être n’ai-je jamais été marié ? J’ai commencé à les voir progressivement. Elles sont toujours là, en réalité, mais la plupart du temps on ne les remarque pas. Elles se contentent d’évoluer aux limites de nos consciences, et elles observent. Elles savent que tant qu’on ne les remarque pas, elles sont impuissantes. Il faut avoir le don. Le pouvoir. Mais le pouvoir vous rend vulnérable. Vous commencez d’abord à les apercevoir, à les entendre parfois. Elles soupirent bruyamment, sans se soucier d’être remarquées. Mais quand elles s’aperçoivent que vous les avez vues, même brièvement, elles observent le silence absolu. Elles attendent.

De la curiosité, vous étiez passés à la vigilance. Mais peu à peu, vous vous relâchez. C’est déjà trop tard alors. Vous ne pouvez plus vivre normalement, car à chaque instant l’assaut peut survenir, et si vous n’êtes pas prêts à le recevoir, c’en est fait de vous. Alors, il faut abandonner le monde, se retirer en un endroit où vous pourrez consacrer tout votre temps à vous défendre, à repousser les attaques contre votre esprit. C’est la seule façon de rester sain d’esprit. Oui, c’est ce qu’elles veulent, vous rendre fou. Pour que vous les oubliiez.

Alors il faut vous préparer. Après tout, vous avez le pouvoir. Ne le refusez pas. Pénétrez dans les cavernes, voyez les flammes des démons et des dieux anciens. Respirez l’odeur de la terre ancienne, ce parfum sec et persistant, cette douce âcreté de moisissure. Ecoutez les craquements des os et des roches. Et elles viendront. Et si vous êtes assez forts, vous les repousserez. Et de ce monde de l’esprit, vous apprendrez.

Les premières fois, vous croyez mourir. Vous suffoquez. Ne paniquez pas. La panique n’est pas la peur. Elle vous déchiquette et disperse vos restes. Elle se nourrit de votre énergie, de vos efforts futiles pour fuir dans la mauvaise direction. Refuser la réalité, c’est paniquer et c’est mourir. N’essayez pas de revenir, car c’est impossible. Ce qui se passe est réel. Si vous rencontrez un dieu, ne le niez pas en prenant pour excuse qu’il n’existe que dans votre esprit. Car c’est là où vous vous trouvez vous-mêmes, et dans ce monde, il peut vous détruire. Adorez-le, et il vous bénira. S’il vous enseigne, vous survivrez probablement, car elles n’ont pas le pouvoir de défier un dieu. Mais n’espérez pas qu’il vous vienne en aide, car elles ne sont rien pour lui, et vous non plus.

Lorsque vous revenez, gardez à l’esprit que le répit ne dure pas longtemps. Ne vous relâchez jamais complètement, car elles vous trouveraient aussitôt. Restez vigilants pour faire durer le repos. Ne dormez pas. Mangez le moins possible, car ce qui vous attache au monde matériel est dangereux et affaiblit votre esprit lorsque vous combattez. Mieux vaut avoir faim, la faim est intérieure. Vous dormirez lorsque vous retournerez là-bas, car il vous sera plus facile d’y dissimuler votre esprit. Tenez-vous toujours prêts à combattre. Soyez attentifs.


Je ne peux pas vous donner d’autres conseils. J’entends des pas dans le couloir. Les infirmiers approchent.

J'aime plutôt bien. Bon, c'est plutôt passif mais comme c'est fait exprès pour travailler un point précis, n'en parlons pas.
C'est bien écrit même si on ne comprend pas tout de la folie du personnage.

Ah oui ! Rien à voir, mais où en es-tu de ton début d'histoire intitulée "Daël, chronique d'une vie après la mort". Je sais, ça date mais j'avais bien aimé.

Hé bien je ne l'ai pas trop avancé, à vrai dire. Je bloque un peu, j'avais ajouté quelques pages, mais sans en être vraiment satisfait, j'ai pensé à recouper pour ne garder que la première partie (juste avant l'arrivée à la station service) et changer l'orientation du texte (mais pour quoi?).

Bref, je suis un peu dans le flou. Je compte bien le reprendre mais j'en suis encore au stade de la réflexion pré-écriture... c'est juste que ça me prend un moment ^^

Salut Daël,

J'ai trouvé que ton texte était bien écrit et soigné.
Quand tu le présentes comme un essai, une retranscription d'impressions, je ne suis pas convaincu (sauf si tu révèles que tu as déjà été interné, bien sûr ) ).
Moi j'ai perçu ton texte comme un début d'histoire fantastique, bien structuré et fort bien raconté (fluide, qui parvient avec élégance à mettre des mots sur l'impalpable), et qui posait les prémices d'un univers parallèle et de ses règles. Dans ce sens en tout cas, je l'ai trouvé très intéressant, jusqu'à ce que j'arrive à la chute, qui ruine en une phrase facile tout ce que tu avais fort bien édifié jusque là.
Dommage. Mais puisque tu annonces que ce n'est pas une nouvelle... que dire ?
En conclusion : pour un simple exercice, c'est sans doute très bien techniquement, mais pour un lecteur lambda (comme moi), c'est d'un intérêt un peu limité.
Au plaisir de te lire à nouveau !

Quand je t'avais dit que j'étais nul pour trouver les fins

Plus sérieusement, là je n'ai fait aucun effort : j'ai mis une petite phrase pour faire une sorte de chute, genre on se demande si le personnage est fou ou pas, mais je l'ai pas travaillé, je m'intéresse surtout au développement du texte sur ce coup, c'était quelque chose que je n'avais jamais essayé, à savoir "dire l'indicible", à la Lovecraft en fait : on parle beaucoup mais on ne décrit rien de concret.

Si je devais le reprendre (un jour peut-être), je ferais surement quelques chose plutôt à la Koontz qu'à la Lovecraft cela dit.

Bon, sensible que je suis à la critique, j'ai réfléchi à ton avis ce matin en allant bosser, et j'ai eu comme qui dirait une inspiration pour continuer cette nouvelle. J'ai même déjà trouvé la chute, une fosi n'est pas coutume, et sur le papier ça sonne bien.

Je me mets au boulot sous peu, en espèrant réussir mon coup cette fois.

Niark.

Vu le niveau du texte avant la chute, je suis sûr que tu vas faire du bon boulot.
Si jamais tu veux un avis avant de te lancer tête baissée, tu peux toujours m'évoquer tes idées par MP.
Bon courage et bon travail !

Remarques en vrac :

"Car c’est là où vous vous trouvez vous-mêmes, et dans ce monde, il peut vous détruire."
=> moche et peu fluide.

"La panique n’est pas la peur"
=> Belle phrase mais qui manque d'ampleur. Avec ce morceau de phrase simpliste tu gaches une belle idée, un 'bon mot'. Faire mieux doit être possible.

"J'ai essayé de retranscrire des impressions dans ces quelques lignes,"
=> Des impressions ?

S'agit-il de cela : "je m'intéresse surtout au développement du texte
sur ce coup, c'était quelque chose que je n'avais jamais essayé, à
savoir "dire l'indicible", à la Lovecraft en fait : on parle beaucoup
mais on ne décrit rien de concret." ?
=> Si par "impression" tu entendais cet exercice que tu t'imposes, alors oui, tu as bien réussi.

Un texte plutôt bien écrit il est vrai, dans la mesure où tu t'impose une certaine ligne de conduite, des consignes : "dire l'indicible", pour moi le contrat est rempli donc.

Par contre à trop vouloir rester évasif, à laisser supposer, à ne pas donner toutes les clés au lecteur pour qu'il comprenne bien le texte, on en arrive à ne pas tout comprendre. Ou du moins à ne pas être sûr. J'ai ressentis une certaine frustration : qui sont ces "elles", c'est quoi cette histoire de grotte et de dieux etc. ?

Folie ok... C'est un peu facile mais soit.
En tout cas cela laisse planer sur ta nouvelle un certain voile brumeux d'incertitude. Pourquoi pas et après tout c'est son charme.

Quant à la fin, elle fait un peu office de service minimum, c'est vrai, cette ligne unique n'est pas vraiment satisfaisante. MAIS, il en faudrait guère plus pour que ce le soit.
Ne te tracasse pas, faut arrêter de se prendre la tête pour les "chutes", ce n'est pas ça qui fait la qualité essentielle de la nouvelle.

*Constat général sans rapport avec ce texte* => C'est marrant comme les gens ici semblent attachés aux "chutes"

Max a écrit:

Remarques en vrac :
*Constat général sans rapport avec ce texte* => C'est marrant comme les gens ici semblent attachés aux "chutes"

Si par chute tu entends "incroyable retournement de situation qui fait que tout ce que l'on croyait avant n'était pas ce que l'on croyait et qu'il faut tout relire du début" (rebondissement final, twist), je suis bien d'accord qu'il ne faut pas chercher à systématiser.
Par contre, la chute, dans le sens "La partie ou période final(e) de quelque chose", est une partie inévitable d'une nouvelle bien structurée, si on en croit les cours de français qui parsèment la toile (exemple : http://www.intellego.fr/soutien-scolaire-4eme/aide-scolaire-Francais/Comprendre-la-structure-d-une-nouvelle/17649).
Et c'est donc normal d'y attacher de l'importance.

Remarques pertinentes.

Je reviendrai sur ces quelques points quand je reprendrai le texte, je pense.

Quant aux impressions, oui, ça correspond à ce que tu as cité, mais je voulais également retranscrire une impression d'urgence, voire de paranoïa.

Quant à la compréhension, ça n'était pas vraiment le but recherché, puisqu'on est effectivement sur le domaine de la folie, ou pas d'ailleurs, mais il fallait le laisser supposer, tout en ayant un petit doute à ce sujet. Bref, je suis évasif à dessein pour le coup.

De ce que j'ai réfléchi après coup, je pense revoir le début qui ferait figure d'intro, j'hésite entre deux options : garder le côté "oppressant" que j'ai voulu ici, en retravaillant la deuxième moitié (la première me paraît bien) pour mêler un aspect nébuleux (on s'en tient aux ombres et on oublie les histoires de dieux anciens - ça n'est pas forcément une idée pertinente) et à la fois âpre et dissonnant, i.e. pour moi qui écrit beaucoup en musique, casser le rythme des phrases en utilisant des formules brèves (ce qui est ce que j'ai déjà fait, mais que j'uniformiserai un peu). Ou alors rendre l'ensemble plus fluide, avec des descriptions plus élaborées, en d'autres termes, plus lisible et moins évasif. Ca apporterait un confort de lecture, je pense, mais je ne suis pas trop fan de cet option, c'était pas mon orientation première.

Daël a écrit:

Ou alors rendre l'ensemble plus fluide, avec des
descriptions plus élaborées, en d'autres termes, plus lisible et moins
évasif. Ca apporterait un confort de lecture, je pense, mais je ne suis
pas trop fan de cet option, c'était pas mon orientation première.

Choisir entre confort de lecture ou ce qui fait le charme du texte
Tu devrait laisser le coté évasif et nébuleux de la folie. Tan pis si le lecteur rencontre quelques incertitudes, ça fait aussi une part de l'originalité de ta nouvelle.
En conclusion garde ton orientation première.