Discovery - Tome 1 - Chapitre 2

Chapitre 2

Le bidonville sud de Dallas était un amoncellement incohérent de caravanes et de baraques faites de matériaux de récupération. Les habitants fourmillaient dans ce dédale des rues sans nom. Les enfants n’étaient pas scolarisés, ils travaillaient à l’ombre de toiles tendues en reconditionnait des cellules photovoltaïques, des piles d’uranium et des bombonnes d’hydrogène liquide. Depuis les premières pénuries d’hydrocarbure, les gouvernements avaient permis l’exploitation des zones naturelles protégées comme la forêt amazonienne ou l’Alaska. Mais tout ceci n’avait que retardé l’inévitable, les énergies fossiles se tarissaient. Les sources d’électricité renouvelables comme l’énergie solaire et éolienne avaient souffert d’un déficit de recherche fondamentale. Le nucléaire s’est donc imposé rapidement. L’hydrogène avait été un combustible difficilement accessible à la population. Au siècle dernier, seules les fusées utilisaient ce carburant non polluant. En effet, sa combustion ne rejette que de l’eau.
La moto volée utilisait ce procédé. Johnny Vega l’exhibait fièrement dans son fief en arpentant les rues de terre battues desséchées. Ce n’était pas la première fois qu’un véhicule dérobé faisait son apparition, mais ça restait quand même un spectacle pour les gamins qui abandonnèrent leurs tâches pour admirer la moto de plus près. Johnny serra quelques mains pendant que d’autres enfants caressaient la carlingue.
L’engin était un modèle de « course », son museau était effilé et la position de conduite était couchée. Les pneus larges entouraient des roues chromées qui reluisaient sous le soleil du Texas. La peinture rouge métallisée détonait avec les murs des baraquements insalubres.
Un des gamins, plus curieux que les autres, s’approcha du tableau de bord et l’effleura.
- Ouah Johnny, c’est quoi ce système !
Le tableau de bord était un grand écran tactile de dix pouces de diagonale. En touchant celui-ci, les indicateurs de vitesse et les jauges avaient disparues. Désormais les cadrans virtuels avaient fait place à des séries de lignes de mots et de codes. Certains d’entre eux firent frémir Johnny : « Tracker » et « NovaGeo granted access»
- Merde ! s’écria le jeune voleur. J’ai oublié de déconnecter le tracker…
- C’est quoi déjà ? demanda le gamin.
- Le système de pistage de la moto… La police pourrait me repérer.
Johnny tenta quelques manœuvres en tapotant sur l’écran pour désactiver le tracker. En vain, la machine semblait insensible à ces manipulations. Il se serra les lèvres. Il s’en voulait d’avoir oublié ce détail.
- Je vais devoir demander à un spécialiste…
- Tu vas voir Gus le fourbe ? demanda un garçon.
- Gus le fourgue, pas le fourbe ! corrigea Johnny. De toute façon je serais aller le voir pour qu’il revende la moto. Mais il n’y a pas que le tracker dans cette moto…
- Tu pourrais détruire l’ordinateur ! proposa un autre en voulant faire le malin.
- Non, si je le fais je ne pourrais pas redémarrer. C’est l’empreinte digitale qui sert de clé. J’ai eu de la chance de pouvoir trouver cette moto alors que l’ordinateur de bord était sous tension.
- Elle peut voler ? demanda une petite fille.
- Oui, c’est un modèle récent. Mais je ne sais pas encore m’en servir...
- Tu nous emmèneras faire un tour ?
- Si je suis toujours sur la Terre, oui, tu feras un tour. Je vous laisse les enfants…
Il partit dans un nuage de poussière, allant rejoindre Gus Arroyo le recéleur.

***



Gus Arroyo était originaire du Brésil, ses parents avaient émigré vers les USA dans les années 2100, espérant trouver une vie meilleure. Meilleure, sa vie l’était certainement, il était même devenu une sorte de notable parmi les habitants de la banlieue sud. Il avait trouvé résidence dans une habitation en béton contrairement à ses voisins, c’était un signe de richesse relative. La police y venait certaines fois pour faire des perquisitions. Gus n’était jamais inquiété, à chaque visite il donnait un pot de vin et tout le monde en sortait satisfait. La corruption était devenue un petit rituel entre amis.
Ce grand noir aux longues dreadlocks était familièrement appelé « Le fourgue ». On le croisait rarement en journée, il préférait dormir pendant que le soleil frappait et sortir la nuit pour donner des cours de Capoiera, l’art martial brésilien. Dans son hamac au sous-sol il ronflait paisiblement, au frais.
Tout à coup, une sirène retentit et des flashes rouges envahirent sa cave. Surpris, Gus tomba de son hamac.
- Quel est le pauvre con qui sonne à la porte en pleine journée ! hurla-t-il en se caressant la nuque endolorie.
Son niveau « -1 » était un vrai bric-à-brac, des bidons d’uranium étaient entassés jusqu’au plafond. Dans un coin, des cages servaient à l’élevage de lapins et de poules. Dans un autre coin, on trouvait toute sortes d’objets électroniques. Sur un établi des restes de robots et de moteurs gisaient en attendant une réparation. Des écrans montés sur des bras articulés étaient fixés au plafond. Le ménage était rarement fait et les émanations provenant de son élevage rendaient l’atmosphère peu respirable.
Un petit robot volant, une boite de conserve avec deux pinces mécaniques tournoyait comme une mouche à travers la pièce. Gus l’avait fabriqué lui-même à partir de composants de récupération et d’une veille boite de céréales en aluminium. Ce robot ne servait à rien, sinon à le divertir. Afin de lui donner un semblant d’âme, il lui avait dessiné un sourire au feutre et implanté deux diodes luminescentes pour matérialiser les yeux.
- Winnie ! lança Gus au robot. Allume moi le visiophone à l’entrée et éteins moi la sirène !
Winnie le petit robot reconnut l’ordre et contrôla les appareils grâce à un émetteur radio. Les écrans suspendus affichèrent une image déformée par la lentille de caméra. Un jeune homme faisait le pitre et des grimaces à l’écran. C’était Johnny Vega.
- Salut Gus !! lança-t-il à travers les haut-parleurs.
- Damned ! Johnny arrête de venir me voir aussi tôt !
- Fais moi pleurer ! Il est presque midi !
- Et il fait 110 degrés Fahrenheit ! Ne compte pas sur moi pour faire de la Capoiera à cette heure.
- Laisse moi entrer !
- Hors de question ! Je termine ma sieste d’abord.
- Attends j’ai une surprise…
Johnny s’écarta de la caméra et Gus aperçut alors la moto rutilante.
- Oui, c’est un bel engin ! répondit le fourgue.
- Fais pas chier ! Laisse moi entrer…
- Non, dit sèchement Gus.
- La moto a un tracker, la police ne va tarder à revenir.
- Tu bluffes ! dit Gus incertain.
- Tu paries ? Je la laisse devant chez toi et je reviendrai ce soir quand tu auras grassement payé tes copains flics.
- Bon d’accord… Je vais désactiver le tracker. Je t’envoie le monte-charge.
Johnny s’approcha du bunker de Gus Arroyo et ouvrit une porte en tôle coulissante qui donnait sur le puit du monte-charge. Une plate forme rouillée entourée de grilles se dressa et Johnny s’y glissa avec la moto.
Au sous-sol, Gus attendait les bras croisés en tapant du pied. Il jetait un regard plein de colère sur son ami qu’il voyait descendre dans son antre.
- Salut Gus ! lança Johnny en faisant rouler la moto hors du monte-charge.
- Toi je te retiens ! Depuis quand tu n’arrives pas à bidouiller les trackers tout seul !
- C’est la première fois que je te demande ce service. Mais j’ai quelque chose qui vaut de l’or à te montrer après.
- Je l’espère ! Parce que, quoi qu’il arrive, le tracker aura émis son dernier signal depuis chez moi. Les flics viendront même si je le déconnecte.
- Oui ma puce ! dit Johnny en faisant un clin d’œil. C’est vrai que les flics te font peur !
- Pousse-toi et laisse moi regarder…
Pendant que Gus tripotait l’ordinateur de bord, Johnny alla faire un tour au réfrigérateur et en sortit une bouteille de bière. Winnie virevoltait autour de lui. En un coup de main il l’attrapa au vol et se servit d’une de ses pinces comme décapsuleur.
- Doucement avec Winnie ! s’exclama Gus qui branchait des câbles informatiques sur la moto.
Le jeune intrus laissa délicatement s’envoler Winnie, comme il aurait lâché un petit oiseau. Un des écrans affichait des séries de codes incompréhensibles. C’était visiblement la source du programme informatique de l’ordinateur de bord. Quelque chose dans ce défilement de séquences numériques dérangeait Gus.
- Où as-tu trouvé cette moto ? demanda-t-il.
- A Dallas dans le quartier d’affaire. Quel est le souci ?
- Le tracker, c’est pas un souci… Je vais aussi craquer le verrou. Mais le programme intègre un laissez-passer de l’United Nations Space Agency.
- Je voulais t’en parler… Ce serait un passe électronique pour le chantier du NovaGeo I.
- T’es dingue ! On ne plaisante pas avec l’Agence ! Hier soir les drones du chantier ont tué trois hommes de la banlieue nord ! Tu me transformes en cible! J’ai pas envie de finir en passoire !
- Les petits merdeux du nord de Dallas se font toujours choper par des drones. Que des nazes, je te le dis ! Nous, on les a toujours matés. Enfin, tu crois que des drones tueurs vont venir jusque chez toi ?
- Je n’en sais rien. En tous cas c’est vrai que ta moto vaut de l’or. Je suis partagé entre le désir de t’acheter la moto et celui de la détruire.
- Moi je suis plutôt partagé entre celui de te la vendre et celui de l’utiliser pour m’embarquer sur NovaGeo.
- Tu crois encore à ces rumeurs ? Tu penses que la Terre est foutue ? Tu penses que les nantis vont s’envoler vers une autre planète ?
- Attends ! On est en train de construire quatre vaisseaux spatiaux gigantesques qui embarqueront des milliers de personnes. L’Agence prétend que c’est une mission scientifique ? Sornettes ! Ce sont des arches de Noé, les vaisseaux de la dernière chance. S’il s’agissait d’une simple mission scientifique, on aurait envoyé des robots comme on l’a toujours fait !
- C’est qui Noé ? demanda Gus. Je ne suis pas allé à l’école, moi !
- Noé c’est un gars du siècle dernier qui a construit un grand paquebot pour échapper à une inondation.
- T’as trop de culture mon pote, je devrais regarder un peu plus la télévision… Moi, je veux rester sur Terre, j’y ai mon business.
- Tu as fini avec le tracker ? J’aimerais demander à mes parents si on peut élaborer un plan pour s’infiltrer sur le NovaGeo.
- Tu m’as fait prendre des risques avec tes conneries ! J’espère que c’est la dernière fois que je te vois sur Terre !
- Tu me dis ça à chaque fois que je te réveille ! Allez bye bye ! Je te tiendrai au courant.
Johnny fit un « au revoir » de la main doublé d’un sourire narquois en montant dans l’ascenseur avec la moto. Gus trouvait son ami irritant, il leva la main pour faire mine de lui envoyer une bonne baffe. Johnny Vega lui tapait constamment sur les nerfs mais il appréciait sa bonne humeur et ses facéties. C’était sûr, si un jour il s’envolait vers un autre monde, il lui manquerait.

On comprend pourquoi tu réclames toujours des dialogues dans les textes des autres ! C'est un domaine où tu excelles !
Il est vrai que pour rendre un récit vivant et attrayant, les dialogues sont essentiels, mais c'est un art difficile que tu maîtrises, pour ma part je ne me sens pas encore assez à l'aise dans ce domaine,il faut que je m'exerce, mais je suis fainéante...
En tous cas bravo, ça se lit bien, c'est très clair, et c'est vraiment dommage d'interrompre si vite !
Quelques petites fautes (26... mais petites...), et une légère erreur : si on est en 2129, Noé ce n'était pas au "siècle dernier" !!
Ah oui ! En 2129 je trouve que les éléments techniques que tu décris ne sont pas si évolués ni révolutionnaires, que ce soit les drones, les véhicules à hydrogène ou la vision infrarouge ! Mais ça n'enlève rien au sujet.
Tu ne veux vraiment pas continuer un peu, juste pour les amis ?...
Mo

Haha Monique !
Oui, Noé n'est pas du siècle dernier ! C'est une erreur exprès pour montrer que le personnage est inculte. D'ailleurs Noé n'a jamais construit de paquebot !

Bon, pour le décollage du vaisseau je vais faire appel à quelqu'un qui s'y connaitrait en fusée Ariane... Il parait que j'ai de la littérature dessus....

Oui je vais continuer pour le plaisir (pour le "fun", comme on dit chez moi).
Le cafard est passé, mais c'est pas pour ça que je vais m'arrêter. Il faut que je dorme aussi... La semaine dernière a été fatigante.

Mais non t'es pas si nulle en dialogues ! Tu veux que je te pousse à travailler les dialogues ?? Ce serait avec plaisir

D'ailleurs, une petite recette : Je trouve qu'un texte a plus de pêche quand il commence par un dialogue. Même si ce dialogue est inutile. On peut aussi transformer une partie descriptive en dialogues.

Exemple :
- En prose -
Monique et Olivier sont deux amis qui tentent une traversée en bateau. Le tangage et la tempête rendent la traversée difficile. Monique attrape le mal de mer. Olivier tombe à l'eau.

- En Dialogues -
- Je suis malade ! s'écrit Monique.
- Eloigne-toi de moi ! dit Olivier avec dégoût. J'ai pas envie que tu me gerbes dessus !
Monique et Olivier sont deux amis qui tentent une traversée en bateau.
- T'es vraiment qu'un connard ! dit Monique offusquée.
- Gloups ! dit Olivier.
Olivier s'est retrouvé à la mer, poussé par Monique.

Dommage que ce petite texte soit si court !! Oh allez, raconte-nous la suite de cette croisière avec monique !

Je n'ai jamais fait de croisière avec Monique. On ne s'est jamais rencontré d'ailleurs.... C'est une pure fiction

Fiction, oui, il est un peu maso Olivier, il rêve de se faire traiter de c... et envoyer à la baille... D'autre part sachez, môssieur, que mon vocabulaire est bien plus châtié que cela !

Cela dit, et bien dit, on pourrait peut-être ici envisager quelques exercices d'écriture pour ceux que ça intéresse ?
Thomas nous crée un nouveau "fuseau" EXERCICES" et on y va ?
Qui a des idées ? On commencerait par un exo avec dialogues obligatoires et sujet à convenir entre nous avec des mots ou des expressions imposé(e)s ?
Tout membre de ce site aurait évidemment le droit et le devoir de venir critiquer à tour de clavier les courageux volontaires ! Il n'y a que comme ça qu'on progresse !
Réfléchissez svp !
A +
Mo

Je vote et je dis je suis pour!!!
Bonne idée Monique, rien de tel pour progresser! Il y a pas mal de choses à voir je pense genre les dialogues comme tu l'as dit, les descriptions, les personnages, les sensations, la tonalité, comment découper un texte etc...
Y a pleins d'exercices intéressants à faire, je trouve ça vraiment constructif!

Mo a écrit:

Fiction, oui, il est un peu maso Olivier, il rêve de se faire traiter de c... et envoyer à la baille... D'autre part sachez, môssieur, que mon vocabulaire est bien plus châtié que cela

Tssss.... J'ai jamais dit que je rêvais de ça ! Bon la prochaine fois je mettrai d'autres noms, "Thomas et Maïté"... J'en sais rien...
Vocabulaire châtié ?? Madâme ? Ca dépend de son humeur

Des exercices? Des trucs à écrire? Je vais faire une cure Guronsan, café, vitamine C... Après quand j'aurai émergé, je verrai ! Gloups !

Bon je viens de finir les 2 premiers chapitres de Discovery. Tu t'en sors remarquablement bien dans un exercice de style compliqué, tu décris bien l'univers et comme l'a dit Monique, tes dialogues sont excellents et très vivants. Et puis quelle imagination! Bravo!
En gros il faut que tu continues ce serait dommage d'arrêter... J'attends les autres chapitres et je ne suis pas le seul à mon avis.

Si on me mettait un flingue sur la tampe et qu'on m'obligeait à faire une critique, je dirais que le texte n'est peut etre pas assez aéré, c'est tout.

Voilà encore bravo!!

"Aéré", ouuuuh... je sens qu'il ne va pas aimer l'ami Olivier, lui qui m'avait demandé de sauter des lignes presque entre chaque paragraphe pour une nouvelle que j'avais diffusée sur un autre site !...
L'arroseur arrosé...
Mo

Remarque les paginations ne sont pas conservées sur les posts donc c'est peut être juste une impression mais bon quand dans un manuscrit il ne reste plus que ça à corriger, je crois que c'est bon signe ;-)

"Ah ça ! c'est ben vrai ça !"

A quand le premier exercice.
J'ai imprimé les deux chapitre je les attaque ce soir au pieu, apres Il était une fois dans l'ouest.

Bonsoir Yann.
Le premier exercice ne saurait tarder, les idées sont là !!
Je ne sais pas si Thomas voudra créer un nouveau fuseau "EXERCICES" ou si on publiera dans l'existant "ECRITURES", on verra ça demain vendredi.
En attendant, puisque tu n'es pas loin, veux-tu nous proposer un mot, celui qui te vient en tête sans réfléchir, et qui serait un mot imposé à tous à intégrer dans l'exercice ?
D'autres volontaires pourront faire de même ensuite, puis on lancera le sujet proprement dit.
Partant ??
Bonne soirée.
Mo

Bah le forum ECRITURES existe pour ça à la base ! Je vais juste modifier l'intitulé pour ATELIER D''ECRITURE ok ? et puis c'est parti pour les exercices !