TEXTE AU FORMAT PDF
Amis lecteur, si vous lisez ce texte vous prenez des risques.
L’histoire que je vais vous conter est vraie.
Est-ce que vous avez lu l’actualité du 13 septembre 2004 ? Vous ne vous en souvenez peut-être pas. Pourtant le monde avait frôlé le feu nucléaire. Ressortez votre journal du 13 septembre…
Cette histoire avait commencé le 9 septembre 2004. Un œil dans le ciel, un satellite espion veillait. Les services secrets étaient en effervescence…
Voilà l’histoire.
***
- Qu’est-ce que c’est que ce bordel ! hurla le général Weiss.
L’officier entra en trombe dans une salle de contrôle de la CIA à Langley. Ce lieu en sous-sol disposait des rangées d’écrans avec des images satellites et des cartes d’état-major. Des opérateurs munis d’oreillettes et micro frappaient à toute vitesse sur des claviers. Sur le mur du fond plusieurs écrans géants diffusaient en boucle l’animation d’une explosion.
Le colonel Reid vint à sa rencontre, fit un salut militaire et lui exposa la situation.
- Mon général, un de nos satellites KH-12 a détecté ce phénomène à 13:04 GMT.
- Ce phénomène ? C’est comme ça que vous l’appelez ? C’est un champignon nucléaire ! s’écria son supérieur en pointant frénétiquement les écrans.
- Non. Nous ne savons si c’est d’origine nucléaire ou conventionnel.
- Mais nos satellites disposent de l’infrarouge et mesurent la température. Si c’est nucléaire, nous pouvons le déterminer.
- Pas vraiment. Car il s’agit peut-être d’une explosion souterraine et, dans ce cas, les mesures sont faussées. Mais je peux vous dire que le nuage fait entre deux et trois miles de diamètre.
- Good lord ! Ca pourrait être un missile balistique qui a explosé dans son silo. Nous devons en avoir le cœur net. Quelles sont les coordonnées ?
- En Corée du Nord, près de la frontière chinoise, dans le district de Kim Hyong Jik.
- Avons-nous les moyens de vérifier ? Je veux dire, des hommes qui permettent d’avoir des renseignements fiables ?
- Je ne pense pas. Aucun agent n’est sur le terrain en Corée du Nord.
Le général Weiss se mordit les lèvres et frappa ses poings avec rage.
- Nous allons devoir faire appel à la collaboration des services de renseignements étrangers. Essayez de garder cette information confidentielle. La presse ne doit rien savoir !
- Devons-nous informer le secrétaire d’état à la défense? Essayons d’obtenir directement une réponse de PyongYang.
- Vous rêvez ? Si c’est une menace nucléaire sérieuse, ils ne nous diront rien! De toute façon cet imbécile de Ronald Dumsfeld est trop occupé à prendre sa raclée en Irak !
***
Quelques dizaines de minutes plus tard en France, à la Direction Général pour la Sécurité Extérieure, Vanessa Van Den Akker reçut l’information de la CIA. Cette femme était un agent fixe de la DGSE, mais auparavant elle avait fait partie de la division « action ».
Désormais son travail se cantonnait à scruter des informations sur son ordinateur. Dans son petit bureau elle recoupait ensuite ses sources avec les données des agents sur le terrain. Tout ceci menait à faire un dossier synthétique sur lequel elle donnait un indice de fiabilité. Les sujets les plus importants étaient alors transmis aux divers ministres concernés.
L’information sur son ordinateur était comme la dépêche d’un organisme de presse : un texte succinct, pertinent et précis. Les services secrets classent les pays par zone d’influence politique. Elle avait le choix entre « Asie/Pacifique » et « Chine ». Quoiqu’il en fût, elle connaissait bien ce terrain. Avec son mari, elle y avait fait plusieurs opérations. Elle devait prendre contact avec lui.
***
Tristan, le mari de Vanessa roulait en moto dans les rues de Namur en Belgique. Il avait rendez-vous avec un cousin pour lui changer son bidet. Son téléphone portable vibra sous sa combinaison. Il stoppa sa Honda Varadero sur la place Léopold et retira son casque intégral pour répondre.
- Capitaine Van Den Akker, annonça-t-il.
- Tristan, c’est Vanessa, répondit sa femme au téléphone.
- Oui ma chérie. Que se passe-t-il ?
- C’est une affaire professionnelle. Pouvons-nous parler ?
Tristan jeta un coup d’œil circulaire. L’endroit ne lui semblait pas surveillé. D’autre part il n’était pas en mission, qui l’aurait suivi ?
- Oui, répondit-il.
- Il y a eu une explosion en Corée du Nord. Il y a des chances qu’il s’agisse du tir raté d’une ogive nucléaire. Le missile aurait explosé dans son silo.
- C’est impossible !
- Comment ça ?
- Les Nord-Coréens n’ont pas encore réussi à enrichir leur uranium. A moins que…
- A moins que quoi ? demanda Vanessa avec effroi.
Vanessa était sur les nerfs. Elle frémissait en attendant sa réponse.
- Peut-être que la Chine l’a fait pour eux ! déclara Tristan.
- Il faut que je vérifie. Est-ce que Hak, le Chinois, est toujours en activité ?
- Oui. Mais il n’est pas en mission. Il est en France.
- D’accord il me sera facile de le joindre.
Soudain, Tristan devint exsangue. On serait alors proche de la guerre nucléaire ? Il était vrai que la Corée du Nord avait ouvertement déclaré la guerre aux USA. Si PyongYang disposait de la bombe, la côte ouest des Etats-Unis aurait pu en être la cible. Il fit alors part de son appréhension à sa femme.
- S’il s’agit d’un tir réel qui a foiré ? Ca voudrait dire que la Corée du Nord voulait mettre à exécution sa menace contre l’Amérique !
- Non, expliqua Vanessa. Le dernier tir d’essai de la Corée du Nord n’avait pas dépassé la mer du Japon. Un missile coréen n’aurait même pas atteint Hawaii. Si le tir est réel, et si tir il y a, la cible devait être à moins de 1000 km. La cible était donc toute autre.
- Appelle Hak de suite. Il te dira certainement si les Chinois ont pu fournir de l’uranium enrichi aux Nord-Coréens.
***
Hak était un petit Chinois, un officier transfuge de l’armée communiste. Il était aussi l’informateur et le partenaire privilégié du couple Van Den Akker lors de leurs missions secrètes en Asie.
Aujourd’hui était un jour de repos. Il méditait, assis en position du lotus sur son canapé. Les parfums d’encens planaient dans sa luxueuse demeure de Bretagne, au bord du golfe du Morbihan.
Un signal sonore retentit dans son vaste salon. Il cessa sa relaxation. En une pirouette souple il se mit sur pied et saisit une télécommande. En appuyant sur celle-ci, un panneau coulissant s’ouvrit pour faire place à un écran plasma géant. Cet écran était relié par Internet et un VPN* (*Virtual Private Network) à la DGSE.
Sur celui-ci défilait les informations provenant de la CIA. Puis, après quelques secondes, Vanessa émit un message :
Vanessa DGSE #2456 :
Est-ce que les Chinois ont fourni la Corée du Nord en uranium enrichi ?
Sur une table basse en bois précieux, un clavier d’ordinateur sans fil gisait à coté d’un médiator. L’ancien officier Chinois le fit sauter dans le creux de son avant bras. De sa main droite il tapa une réponse avec dextérité :
Hak OSM #401998 :
Affirmatif. Les Chinois ont enrichi de l’uranium pour les Nord-Coréens.
Le Chinois se contenta de répondre succinctement. Il était officier de l’armée de Chine, pas un grand bavard.
Vanessa DGSE #2456 :
Suffisamment pour faire combien d’ogives ? Est-ce que l’explosion détectée par le satellite pouvait provenir d’une ogive nucléaire ?
Hak OSM #401998 :
La fourniture d’uranium était limitée à des échantillons pour faire des essais en laboratoire. Pas plus d’une ogive n’aurait pu être armée.
Vanessa DGSE #2456 :
L’explosion visualisée peut alors être nucléaire ?
Hak OSM #401998 :
Affirmatif. Les coordonnées correspondent à un silo. Pour moi il s’agit bien d’une explosion souterraine d’un missile à tête nucléaire.
Vanessa DGSE #2456 :
Mais dans ce cas précis, les Nord Coréens ne sont plus en mesure de lancer un autre missile. Leur stock d’uranium serait épuisé ?
Hak OSM #401998 :
Affirmatif. Il faut juste aussi espérer que le laboratoire a été détruit lors de cette explosion. Mais il leur reste du plutonium non enrichi.
Vanessa DGSE #2456 :
Je vais demander une opération de renseignements sur ces lieux. Je vais te mettre sur le coup.
OFF.
Hak éteignit alors son écran plasma, referma le panneau et se remit à méditer.
A Paris, Vanessa rédigea son rapport pour le ministre de la défense. Elle intitula son dossier « explosion d’une ogive nucléaire en Corée du Nord ». Son indice de fiabilité était de 80%.
Ce rapport fut relayé auprès de la CIA et des services britannique, le MI6.
Malheureusement une information avait filtré auprès des organes de presse.
Le 12 septembre 2004, Seoul et Washington décidèrent de masquer la vérité. Toute menace de prolifération nucléaire était évitée du fait de la déflagration souterraine du laboratoire d’essais. Le pire était derrière.
Le 13 septembre 2004, le MI6 émit un bulletin d’intoxication pour la presse grâce à un accord secret entre PyongYang et Londres. Le ministre britannique du « Foreign Office » s’était d’ailleurs rendu lui-même en Corée du Nord. La BBC annonça alors que le champignon de 3,5km de diamètre était la résultante de l’arasement d’une montagne. Cet arasement aurait servi à un futur barrage hydro-électrique.
***
Voilà, amis lecteurs, la fin de cette histoire.
Amis lecteurs, regardez maintenant autour de vous. A priori vous ne voyez rien d’anormal. Regardez au dessus de vous.
Vous ne voyez rien de suspect ?
Pourtant, dans le ciel, un œil est capable de vous voir. Votre téléphone portable indique chacun de vos mouvements. Votre conversion sur votre téléphone fixe est analysée par le programme Echelon de la CIA. Votre ordinateur est plombé par des programmes espions.Vos adresses IP et e-mail sont enregistrées sur des milliers de serveurs informatiques.
Le seul fait d’avoir lu ou imprimé ce texte, vous permet d’être fiché par la CIA.
Aux yeux de services secrets vous êtes dangereux. Désormais vous connaissez la vérité.
Eteignez votre ordinateur.
Sujet: Atelier 2 : Eye in the sky 
Sinon ce que je trouve fort c'est que le tout est très crédible et les dialogues convaincants, alors que le sujet était délicat à manier.
